Billet d'humeur journalistique :
" ... ce qui est dingue dans cette histoire c'est qu'un jour un "officiel" va toquer à la porte de quelqu'un pour lui apprendre qu'il (ou elle) est descendant direct de Léonard, moi cela me plairait bien d'avoir ce genre de coup de sonnette...!!!
Info L'OBS
A la recherche de l'ADN de Léonard de Vinci
Un groupe d'experts a lancé un projet de recherches visant à mieux connaître la vie (et la mort) de Léonard de Vinci en utilisant les ressources offertes par la science contemporaine.
l a étudié l'anatomie comme personne à son époque, "inventé" le parachute et l'hélicoptère, et surtout peint des chefs d'oeuvre admirés aujourd'hui encore. L'archétype de "l'Homme de la Renaissance" est bien entendu connu pour ses oeuvres artistiques, peintures et dessins. Mais il y a encore de nombreuses questions en suspens sur la vie et la mort de Léonard de Vinci.
C'est en espérant y répondre, au moins en partie, qu'un groupe de travail s'est formé voici deux ans, réunissant des experts en histoire, anthropologie, généalogie et en microbiologie. Cette semaine, ils font un état des lieux de leur "Projet Leonardo" avec deux événements simultanés : une réunion de travail à Florence (Italie), et la parution de certains de leurs travaux dans un numéro spécial de la revue "Human Evolution".
Comme Richard III et Cervantes
Pour les promoteurs du projet, il y a deux exemples à suivre :
- la découverte de la tombe de Richard III, en Angleterre, qui a permis de très nombreuses analyses, et fait parler le corps du roi défunt jusqu'à connaître précisément les causes de sa mort, modéliser son visage, et même éclairer l'histoire de sa famille.
- la quête de la tombe de Cervantes, qui a abouti à la découverte l'an dernier des ossements de l'auteur de Don Quichotte, 400 ans après sa mort.
Dans les deux cas, les nouvelles technologies se sont alliées à une recherche historique plus classique, et les outils de la science moderne ont permis de percer des secrets vieux de plusieurs siècles. La recherche dans les textes anciens, la généalogie, mais aussi les techniques de sondage radar et la génétique, sont capables ensemble d'obtenir des résultats impressionnants.
Concernant Léonard de Vinci, il reste en effet quelques mystères à éclaircir. Par exemple, on sait qu'il a été enterré à Amboise, où il résidait sous la protection du roi de France, François 1er, et où il est mort en 1519, à 67 ans. On pense aujourd'hui que ses ossements se trouvent dans la chapelle Saint-Hubert, au château d'Amboise, sans cependant que l'on ait de preuves irréfutables : "Il a été enterré en un lieu qui a connu des changements dans les années suivant sa mort, aussi l'emplacement exact de la tombe a été perdu," expliquent les chercheurs du Projet Leonardo.
Léonard de Vinci a été inhumé dans l'église Saint-Florentin d'Amboise, qui a été pratiquement détruite il y a plus de 200 ans. Ce sont des fouilles réalisées en 1863 qui ont permis la découverte des ossements, enterrés ensuite dans la chapelle Saint-Hubert.
Faire parler l'ADN
L'écrivain et historien Ross King émet des doutes sur la méthodologie employée alors pour l'identification des os en question, et plaide pour une étude détaillée de ces restes humains. "On s'attend à ce qu'ils soient en accord avec certaines informations connues concernant son régime alimentaire, sa condition physique, son état de santé, ses habitudes personnelles, ses lieux de résidence et son apparence physique", écrit-il.
Par exemple, du fait d'avoir passé sa vie en contact avec les peintures et colorants de son époque, son corps devrait contenir diverses substances (plomb, arsenic, mercure...). On sait également aujourd'hui retrouver dans des ossements les traces des mouvements géographiques, notamment par la proportion de certains éléments radioactifs (comme le strontium) qui varient en fonction des lieux. Léonard de Vinci était végétarien, et ce régime alimentaire aussi a des conséquences sur la composition de ses restes...
Les scientifiques aimeraient donc, s'ils obtiennent les autorisations nécessaires, examiner les os en question, et même tenter d'en extraire de l'ADN. Les promoteurs du projet souhaitent en effet "comparer l'ADN des parents passés et présents de Léonard avec les restes physiques qui lui sont associés : cheveux, os, empreintes digitales et cellules de peau".
Avoir son ADN, c'est aussi pouvoir éventuellement établir un profil génétique, "suffisamment étendu pour mieux comprendre ses capacités et son acuité visuelle", espèrent-ils.
Cette recherche concerne non seulement les ossements, mais aussi certaines traces qui pourraient être extraites des oeuvres de l'artiste. La restauration de certains tableaux peut en effet offrir l'occasion de recueillir de la poussière susceptible de contenir des traces d'ADN, qui pourraient alors être comparées à celui des ossements et de la famille.
35 parents contemporains, en ligne directe
La famille, justement, fait partie des pistes de recherche du Projet Leonardo. Le mois dernier, une conférence tenue à Vinci, ville natale de l'artiste, a présenté les résultats d'une étude qui a permis d'identifier certains membres contemporains de sa famille en ligne directe.
S'il n'a pas eu d'enfant connu, Léonard de Vinci n'était pas, loin de là, le seul rejeton de son père Piero. Alessandro Vezzosi, directeur du Museo Ideale Leonardo da Vinci, qui collabore avec le Projet Leonardo, a non seulement pu, grâce à la généalogie, retrouver 35 descendants vivants de Piero da Vinci, mais a aussi identifié des sépultures, des ancêtres, et des lieux importants de l'histoire de sa famille. Les résultats partiels de cette recherche sont également présentés par M.Vezzosi dans le numéro spécial de "Human Evolution".
La tombe familiale des Vinci est également un sujet de mystères, que la science pourrait éclaircir. Piero da Vinci a en effet fait construire une tombe pour lui et ses descendants dans un monastère florentin connu sous le nom de Badia Fiorentina.
"La famille complexe de Léonard comprenait quatre belles-mères et 23 demi-frères et demi-soeurs et leurs enfants, la plupart d'entre eux étant enterrés dans la Badia", explique Anne Leader, historienne de l'art, qui a traqué l'emplacement possible du tombeau. Comme pour la tombe de Léonard, des changements et rénovations dans l'église ont fait perdre la trace de l'emplacement exact du caveau mortuaire, et c'est à un véritable jeu de piste historique que s'est livrée Anne Leader. Si elle pense avoir trouvé l'endroit, cela reste à confirmer par des fouilles archéologiques.
C'est là qu'intervient encore une fois la technologie, et plus particulièrement le radar à pénétration de sol, une solution non invasive pour connaître le contenu du sous-sol avant de procéder à d'éventuelles excavations. L'utilisation de cette méthode dans la Badia Fiorentina a permis de réduire les emplacements possibles de sépultures à huit emplacements, dont cinq dans la partie principale de l'abbaye et trois dans une chapelle annexe. Reste encore à retrouver la bonne.
Objectif 2019
Les différents morceaux du "da Vinci puzzle" pourraient cependant être assemblés dans les années à venir. L'objectif affiché par les membres du Projet Leonardo est en effet d'aboutir à une conclusion en 2019, pour le 500ème anniversaire de la mort de l'artiste.
"Je pense que tout le monde dans le groupe croit que Léonard, qui a consacré sa vie à l'avancement de l'art et de la science, qui se délectait des puzzles, et dont les talents divers et les idées continuent à enrichir notre société 500 ans après sa mort, aurait accueilli favorablement l'initiative de cette équipe, et aurait probablement voulu la diriger s'il était encore en vie aujourd'hui", assure Jesse Ausubel, de la Richard Lounsbery Foundation, qui finance le Projet Leonardo.
Si cette équipe internationale et pluridisciplinaire parvient à ses fins, on pourrait espérer, dans quelques années avoir une reconstitution du visage de Léonard de Vinci, de la même manière que nous avons aujourd'hui celui de Richard III d'Angleterre. Et la comparer aux portraits qui le représentent...