Clin d'oeil à Carnet d'émotion parfumée.

Clin d'oeil à Carnet d'émotions parfumées .... on respire à fond!



dimanche 10 avril 2016

Alain Thebault, l'homme qui veut "uberiser" la Seine grâce à Sea Bubbles

Billet d'humeur journalistique :


" ...cela ressemble à une grosse araignée sur pattes ... !!!"






Info Huffington Post
Alain Thebault, l'homme qui veut "uberiser" la Seine grâce à Sea Bubbles
uand vous avez un rêve, l'important, c'est de foncer. Un adage que ne renierait pas Alain Thébault. Le rêve de ce navigateur français, pendant des années, fut de voler sur l'eau. Il y a dix ans, il a réussi son pari fou avec l'Hydroptère, un voilier qui glisse sur l'eau sans faire de vagues.
Pourtant, des vagues, cet homme au regard enflammé en fait des tonnes pour arriver à ses fins. Depuis juin dernier, il s'est fixé un nouvel objectif ambitieux, qu'on pourrait presque considérer comme impossible. Dans ce cas, "c'est le bon niveau d'ambition", estime cet autodidacte. Ce projet, c'est de voler sur la Seine. De "l'ubériser". Son nom? Sea Bubbles. Si vous n'en avez pas encore entendu parler, ça ne saurait tarder.
L'idée est toute simple. Une bulle posée sur le fleuve dans laquelle vous rentrez ("même en talon, c'est important!") et qui va vous transporter au fil de l'eau. Mais à l'inverse d'un bateau, celle-ci ne flotte pas, elle vole. Plus exactement, elle s'élève au dessus de l'eau et seuls quatre fines ailes gardent le contact avec la surface. Le tout fonctionnant à l'électricité. "Zéro émission, zéro bruit, zéro vague."
"On utilise le même système qui permet aux avions de voler. L'air qui passe au dessus de l'aile génère une portance", explique Alain Thébault, en courbant une feuille de son cahier Clairefontaine et en soufflant dessus. Celle-ci se soulève. C'est comme cela que fonctionne l'Hydroptère, le voilier sur lequel il a travaillé 20 ans, qui a battu le record du monde de vitesse en 2009. Le concept est tout simple et utilise des foils, des ailes profilées utilisées dans le monde nautique. Mais derrière, il y a beaucoup de travail de physique, d'aérodynamisme. Le projet a impliqué de nombreuses personnes, à l'instar de l'ingénieur à la retraite Philippe Perrier, en charge du design du Rafale chez Dassault.


sea bubbles
Pourtant, Alain Thebault n'est pas ingénieur. Autodidacte, il arrête l'école à 17 ans et choisit la planche à voile. Ce n'est pas qu'il n'y excellait pas (il était "premier en maths"), mais les cours sont très normés. Et les normes, il n'aime pas ça, lui qui allait en cours sans chaussures et qui a passé plus d'une nuit à dormir dehors, sur un banc, en ciré, à Port Haliguen, dans le Morbihan. "Entre 8 et 10 ans, j'ai vécu dans un pensionnat en face de la maison de ma mère, à Pont l'Abbé, en Bretagne. Elle était malade et je ne pouvais pas aller la voir. C'était très difficile. Je voyais beaucoup d'oiseaux par la fenêtre et je me disais qu'un jour, je volerais", raconte-t-il.
Et s'il n'a pas de bagage universitaire, il a la passion, l'enthousiasme, lui qui met la liberté comme principe de vie et signe tous ses mails d'un "à donf!". Quand il me parle du projet dans un restaurant près de la Bibliothèque François Mitterrand, il est effectivement à fond. Entre les pages de son cahier Clairefontaine, son principal outil de travail sur lequel il a dessiné les premiers croquis de Sea Bubbles, les échanges de mails et les photos qu'il montre sur son Mac, il ne touche presque pas à son assiette.
sea bubbles

Tellement enthousiaste qu'il en est "impossible à vivre au quotidien", s'exclame sa plus jeune fille, Victoire. Hyperactif, l'inventeur. Victoire est bien placée pour le savoir. Actuellement, il vit dans le studio de sa fille, à Paris. Une collocation "difficile", car elle doit cacher le chocolat quand il est là. Mais elle est toujours heureuse de son arrivée... et de son départ, parce qu'il "est impossible à vivre plus de deux jours"!
"Je dors sur un matelas sur une planche en bois et à côté de ça je rencontre des patrons du CAC40", résume-t-il. Et le fait est qu'il y a des intéressés pour investir dans ces bulles volantes sur la Seine et sur les autres fleuves qui sinuent à travers les mégalopoles.
BMW, Renault, Bolloré, Tesla, Uber, Google, la BPI, l'Ademe, EDF... Alain Thébault enchaîne les rendez-vous depuis quelques mois, pour parler de Sea Bubbles et trouver des investisseurs. Et les réponses sont plutôt positives. Henry Seydoux, le PDG de Parrot, le fabricant de drones français, a déjà mis 100.000 euros sur la table. Un investissement validé par texto. Le fonds de capital-risque Partech Ventures a rajouté 150.000 euros. Il en manque encore 250.000 pour finaliser la levée de fonds qu'il a mis au point avec son équipe.
Car pour réaliser son rêve, Alain Thébault n'est pas tout seul et ne l'a jamais été. S'il est libre, "il sait bien s'entourer, il cerne vite les gens", raconte Thomas Lesage, son ancien bras droit "à terre", qui s'occupait des sponsors et de l'opérationnel de l'Hydroptère jusqu'en 2013, et qui travaille maintenant pour une célèbre marque horlogère.
Trottinette et Uber
Alain Thébault ne perd pourtant pas de temps quand il recrute. En général, la première rencontre avec lui est quelque chose dont on se souvient. Pour son entretien d'embauche, il y a plus de 5 ans (un stage d'étudiant), Thomas Lesage a un rendez-vous avec un cadre du projet Hydroptère. "Alain est rentré dans le bureau par la fenêtre, avec sa trottinette à la main. On a échangé deux trois mots et il m'a dit 't'es embauché'."
Mais ce n'est pas parce qu'il fonctionne au feeling qu'il ne regarde pas les CV. Enfin, une ligne précise des CV. Son dernier recrutement, il l'a fait en se basant sur une partie que l'on pourrait juger inutile: les hobbies. Dans celle-ci, la mention d'une licence de pilotage commercial. "Cinq minutes après que mon CV a été transmis, je reçois un coup de fil d'Alain me demandant si je suis dispo maintenant", se souvient Salim Helou, qui accompagne aujourd'hui Sea Bubbles dans un rôle de conseil. Helou commence à proposer des dates, mais quand Thebault dit maintenant, c'est maintenant. "Bouge pas, on arrive en Uber." Cinq minutes plus tard, embarqué dans le VTC pour rejoindre un café, encadré par notre inventeur et Anders Bringdal, recordman du monde de vitesse en windsurf et cofondateur de la start-up, Salim Helou se fait "pitcher" le projet. A peine le temps de se poser au bar que la collaboration est actée.
Heureusement qu'il sait bien s'entourer, car si l'incandescence d'Alain Thébault est une force palpable, que l'on ne peut manquer dans son regard, c'est aussi parfois un défaut. Il avoue lui-même ne pas être très diplomate et "avoir un peu de mal avec les règles". Ses collaborateurs, à l'inverse, sont plus carrés et arrondissent les angles. "Il ne lâche jamais le morceau, il va toujours au bout, même si parfois il est fracassant, mais il reste toujours correct", raconte le cofondateur de Sea Bubbles Anders Bringdal.
Lors de son entretien, Salim Hedou se souvient d'un coup de fil d'un avocat du port d'Hawaï qui menaçait d'envoyer l'Hydroptère à la casse. Son stationnement sur l'île depuis sa traversée de Los Angeles à Honolulu (la première traversée d'un océan pour le vaisseau) pose quelques problèmes administratifs auquel l'inventeur n'a pas réfléchit.
Cette traversée en elle-même reflète bien le genre d'incident diplomatique qui peut émailler la vie du navigateur. Prévu depuis 2013, le but de ce voyage était de battre un nouveau record du monde. Mais l'affaire prend l'eau en 2014 car un des partenaires se retire du projet et porte plainte. Le litige? Le sponsors estime que les clauses du contrat n'ont pas été respectées.
sea bubbles

Qu'à cela ne tienne, pour financer sa traversée vers Hawaï avec l'Hydroptère, Alain Thébault vend sa maison. Il ira également voir le Prince Albert de Monaco pour que sa fondation participe au financement. Sur la photo, le costume n'est pas le sien. C'est un prêt de la maison Hermès. D'ailleurs l'étiquette dépasse et le Prince le remarque, raconte le navigateur. Il répond: "Je préfère investir dans des cordages plutôt que dans des costumes!"
Malgré tout, il finira interdit bancaire pendant son voyage dans le Pacifique. "La banque qui m'a coupé ma carte bleue me déploie maintenant le tapis rouge pour Sea Bubbles. Je suis chanceux, mais les entrepreneurs en France sont asphyxiés, les grandes banques les maltraitent", affirme le navigateur qui veut pourtant garder le centre de gravité de sa future société en France "si c'est possible".
Finalement, début juillet, l'Hydroptère arrive à Honolulu mais sans battre le record. Pas grave, car l'objectif a changé, notamment via la fondation du Prince: promouvoir les énergies propres. Hasard qui fait bien les choses, l'arrivée sur l'île a lieu 24 heures avant celle d'un autre projet futuriste, écologiste et un peu fou: l'avion Solar Impulse du Suisse Bertrand Piccard.
C'est justement sur une plage de Waikiki que l'idée écolo de Sea Bubbles naît. Joséphine, Héloïse et Victoire, les trois filles d'Alain Thébault, l'ont rejoint. "Elles me disent que c'est très bien d'avoir fait tout ça, mais qu'il faut permettre à tout le monde de voler et être plus utile pour la collectivité". C'est le déclic. Pour lutter contre les embouteillages, il faut réutiliser les fleuves délaissés, eux qui ont dicté pendant des siècles l'établissement des villes. "En utilisant la technologie de l'hydroptère, on a 40% de traînée en moins. Ce frottement en moins permet des véhicules 100% électriques.
sea bubbles
Les prototypes sont lancés, avec le designer Marc Van Peteghem et l'ingénieur à la retraite Philippe Perrier. Deux prototypes sont actuellement testés (dans des baignoires). Un premier essai en juin est prévu sur la Seine, car Anne Hidalgo, enthousiaste, veut que "Paris soit la première capitale à tester les deux premiers prototypes dès le printemps".
Au départ, le business plan prévoit 3000 à 5000 bulles d'ici 2018, conduites par des pilotes professionnels, principalement pour se rendre d'un point A à un point B, par exemple entre différents lieux touristiques. Mais Alain Thébault voit plus loin. Il veut que Sea Bubbles soit une sorte de Velib. Avec une application "CatchBubble", à l'instar d'Uber (qui est intéressé par le projet).
En attendant, il faut faire marcher la société, trouver les partenaires, réfléchir au concret, au présent. Et ce n'est pas toujours simple raconte Salim Helou. "Mon défi cette semaine, c'est d'arriver à caler une réunion de trois heures sans interruption. J'ai insisté dix fois, mais ce n'est pas facile, Alain est toujours en mouvement." Au final, il a réussi à le retenir deux heures, un "miracle". A donf.
sea bubbles

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire